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Meat is burger

lundi 23 juin 2014, par Louise Jacquet, Sylvain Marchand.

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Mener des actions culturelles riches dans le but de sensibiliser des publics à l’art en dépassant les barrières sociales, psychologiques et linguistiques, tel était l’objectif de la belle aventure qui a lieu en avril dernier.

Dans le cadre du Zepa 2, la compagnie anglaise Ramshacklicious a été accueillie en résidence de création à l’Atelier 231 pour son nouveau spectacle Grime. A cette occasion, et en collaboration avec le Pôle Image Haute-Normandie, des ateliers vidéo ont été proposés auprès d’un groupe de patients en situation de handicaps psychiques de l’hôpital de jour Lucien Bonnafé du Centre Hospitalier du Rouvray. Menés par Michaël Leclere, réalisateur professionnel indépendant, ces séances se sont inscrites dans le cadre du dispositif Passeurs d’Images. En parallèle de cette action, une comédienne artiste thérapeute de la compagnie anglaise, Holly Stoppit, a conduit avec un autre groupe de patients de cet hôpital une série d’ateliers artistiques (théâtre, écriture, chant et dessin) pour explorer ce que signifie vivre avec une maladie psychique.

Le projet vidéo

L’objectif de ce parcours d’éducation à l’image était de réaliser un film documentaire, Meat is burger, sur le quotidien d’une compagnie dans sa recherche de démarche artistique. Après avoir suivi des ateliers d’initiation à l’image, un groupe de 7 patients a bénéficié de 48 heures d’ateliers vidéo consacrées à la création de ce documentaire. Une réflexion commune a été menée sur la construction du contenu du film (tournage et interviews) qui a permis de développer leur imaginaire collectif. A travers les différentes pratiques, la prise de son, le cadrage, la lumière, le montage et les interviews, chaque patient a su trouver sa place et exprimer sa créativité. En interrogeant les membres de la compagnie Ramshacklicious, les participants se sont familiarisés avec les différents corps de métiers (metteur en scène, décorateur, costumière, comédien, auteur, ingénieur du son) et ont ainsi tissés des liens avec la compagnie. Ils ont également filmé les ateliers artistiques menés par Holly vers l’autre groupe de patients permettant un temps d’échange fort et un nouveau regard sur l’autre. Ces ateliers ont favorisé le développement d’un esprit d’équipe, d’entre-aide au sein du groupe. Ainsi, les patients les plus à l’aise avec le matériel, ont pu transmettre leur savoir-faire et partager leurs expériences avec les autres participants. Ils ont put exprimer leur sensibilité artistique à travers la captation d’images, les choix de cadrages, de plans. Les propositions de chacun des participants ont toujours été mises en valeur. C’est dans la convivialité, la sérénité et la bienveillance que ce sont déroulés ces moments de partages en images

Ce projet a obtenu le soutien de l’ARS (Agence Régional de Santé) et de la DRAC (Direction Régionale des Affaires Culturelles) de Haute-Normandie, répondant à l’appel à projets « Culture et Santé » dans le cadre du dispositif « Culture à l’hôpital »


Interview de Michael Leclere, réalisateur

1/ Peux-tu te présenter et nous dire quelques mots sur ton parcours ?
J’ai suivi des études dans le secteur du cinéma et je suis réalisateur indépendant depuis 5 ans. Je me suis spécialisé dans le clip d’artistes musicaux signés sur des labels indépendants. J’ai choisi de m’adresser à des personnes un peu en marge du secteur de l’industrie musicale. D’ailleurs, c’est un peu ma doctrine : « m’adresser à ceux qui ne sont pas encadrés par des structures dites professionnelles, à tous les indépendants et autres adeptes du DIY (Do It Yourself) ». C’est dans ce contexte que j’ai eu l’opportunité de rejoindre le dispositif « Passeurs d’images » via le Pôle Image de Haute-Normandie.

2 / En quoi consiste le dispositif « Passeurs d’images » brièvement ?
Passeurs d’images est un dispositif d’éducation à l’image hors temps scolaire, en direction des publics ayant des difficultés d’accès aux pratiques culturelles et cinématographiques. Ce dispositif est soutenu par le Ministère de la Culture et de la communication et le Centre National de la Cinématographie, il est coordonné dans notre région par le Pôle Image Haute-Normandie.

3/ Peux-tu nous expliquer comment se sont déroulés les ateliers vidéos avec les patients ?
Les ateliers ont été organisés en trois grandes phases.

La première étape a consisté à aborder la prise en main du matériel et la découverte de certaines règles nécessaires en vidéo afin d’obtenir un résultat optimal. Ces aspects étaient ponctués d’exemples à l’appui pour une meilleure assimilation. L’important pour moi était de procéder à une « démystification du matériel audio-visuel ». Les patients ont, par exemple, eu la caméra entre les mains dès le premier jour afin de s’accaparer le plus vite possible du matériel.

La deuxième étape était la phase du tournage. La principale frontière à franchir pour les patients était d’appréhender les lieux et de trouver de l’aisance avec les personnes à interviewer. Du fait de la collaboration initiée en 2013 entre l’Atelier 231 et l’hôpital, les lieux étaient déjà connus de tous les patients. Pour l’aspect relationnel, les patients étaient extrêmement bienveillants entre eux. L’effet de groupe a donc eu une portée très positive, ce qui leur a permis d’être rapidement à l’aise avec des personnes qu’ils ne connaissaient pas.

Les ateliers préliminaires ont joué un rôle très important car ils ont été très « professionnels » dans leur façon de cadrer une fois sur le terrain. Le but étant de les laisser au fur et à mesure tout seul sans que je n’intervienne systématiquement pour contrôler leur cadrage.

L’aboutissement de ces ateliers a été la captation du spectacle lors de la Visite de Chantier de la compagnie car ils ont été totalement autonomes dans leurs choix de cadrage. Ils n’ont eu aucunes consignes de ma part. Je me suis d’ailleurs attelé à une autre caméra pour avoir un angle de restitution différent.

La troisième et dernière étape a été la phase de montage et aussi celle de trouver le titre du documentaire. Pour cela, je suis venu durant un mois avec une station de montage à l’hôpital. Ils étaient donc tous les 8 avec moi devant la console à décider des orientations à prendre. Je souhaitais qu’ils effectuent eux-mêmes les tâches informatiques, mais nous avons dû y renoncer car ils maîtrisent mal l’utilisation de la souris. On a donc décidé comme un accord que je m’occuperai de la partie technique, et que j’effectuerai ce qu’ils me demanderaient de faire, en étant juste leurs mains en quelque sorte ! Je les ai implement orienté de temps en temps lorsque que j’estimais que quelque chose ne fonctionnait pas très bien.

4/ Après 3 mois passés avec les patients, as-tu un moment en particulier que tu conserveras de ce projet ?
Ce n’est pas un moment précis qui me vient spontanément à l’esprit, mais une personne en particulier. Lors de ces ateliers, il faut préciser que l’on se situe très souvent au cas par cas. Autant les ateliers peuvent apporter beaucoup de choses aux personnes qui sont actifs dans leur participation, autant cela peut s’avérer plus difficile pour celles qui sont plus réservées et donc en retraits. C’était le cas de Florent, que je connaissais déjà pour avoir participé au film réalisé l’année dernière sur la compagnie Babylone accueillie en résidence à l’Atelier 231. C’est une personne extrêmement timide au point d’avoir beaucoup de difficulté à vous regarder dans les yeux, préférant très souvent regarder ses chaussures. Ça me dérangeait beaucoup, car je voyais que les ateliers l’intéressaient mais du fait de sa timidité il éprouvait beaucoup de difficultés à s’intégrer. On l’a donc poussé à ce qu’il endosse le rôle du journaliste, en lui disant « vas-y, tu peux le faire ! Et à l’arrivée, on a découvert une autre personne ! ». C’est là où, quelque part, la magie opère. Je suis content lorsque je vois que je peux apporter quelque chose comme cela aux personnes qui participent aux ateliers. Aujourd’hui, malgré sa timidité, il me renvoie quelque chose de très positif ! C’est une victoire personnelle pour moi.
Un autre moment a été l’interview d’Holly. L’interview a été très fluide. Avec les patients, il y a des jours « avec » et des jours « sans ». Ils ne sont pas pareils lorsqu’il fait beau que lorsqu’il pleut par exemple. Les jours de pluie, ils sont plus moroses. Lors de cette interview, tout le monde était en forme, ils étaient tous à l’aise y compris dans les questions. J’en garde un excellent souvenir !


photo de Michael Leclere et Holly Stoppit

Le projet Théâtre

C’est toujours dans une atmosphère de sérénité, de dialogues et de partages, que les 7 autres patients ont put bénéficier de 12h d’ateliers artistiques. Dans un premier temps, chacun des membres du groupe, ainsi que Holly et Chloé Lacheray, éducatrice spécialisée de l’hôpital, ont pris le temps de s’écouter, d’échanger et de se comprendre afin de définir collectivement le déroulement des séances. En utilisant différents médium comme le théâtre, la chanson, la poésie, le dessin, les patients ont pu libérer leurs paroles, leurs corps et ainsi exprimer leurs intériorités et leurs angoisses. Cet exploration artistique et intime leur a permit d’expliquer ce qu’était leur maladie par le biais d’objets comme un bouquet de fleur, du tissus, un instrument de musique. En les sortant de leur quotidien, ces exercices ont été une réelle évasion comme en témoigne les mots de Chloé : « Les exercices proposés leur permettaient de s’évader, de mieux sentir leur corps, de stimuler leur imaginaire et de créer un imaginaire collectif. J’avais rarement entendu les patients se livrer de cette façon ». Une restitution publique de ces ateliers a eu lieu durant la Visite de Chantier de la compagnie Ramshacklicious, permettant aux patients de se confronter aux regards des spectateurs.

Interview de Holly Stoppit

1/ Pourrais-tu te présenter et nous parler de ton parcours ?
Je m’appelle Holly Stoppit. J’ai grandi dans une famille de cirque et de théâtre, sur la route. Je me suis formée auprès d’autant de professeurs en clown et en improvisation que possible ce qui m’a permis de beaucoup travailler en tant que clown/musicienne/metteuse en scène dans les milieux du théâtre de rue, du cirque, du cabaret, ainsi que sur des tournées en milieu rural et dans des écoles.

En 2010, j’ai suivi un Master en drama-thérapie dans le but de répondre à ma grande fascination sur l’énorme potentiel transformationnel du processus créatif. Mon mémoire portait sur les bénéfices thérapeutiques potentiels d’une formation aux techniques de clown (la clown-o-thérapie).

Aujourd’hui, je travaille principalement en tant que professeur de clown, consultante en clown et thérapeute-clown.

2/ Peux-tu nous expliquer comment se sont déroulés les ateliers théâtre menés avec les patients en situation de handicaps psychiques de l’hôpital de jour Lucien Bonnafé ? Qu’avez-vous travaillé en particulier ?
Les ateliers ont été pensés dans le but de répondre aux besoins / désirs / préférences des patients. C’est-à-dire que j’ai pris la tête du groupe tout en donnant une structure autour de laquelle le groupe pouvait s’exprimer. Ce groupe était composé de sept patients, de leur éducatrice spécialisée, Chloé, et d’une personne pour la traduction, Sam ou Julia selon les fois. Pendant les deux premiers ateliers, nous avons fait connaissance et cela m’a permis de comprendre comment le groupe préférait travailler. Nous avons joué à des jeux, dansé, inventé des histoires et des chansons, créé des œuvres d’art et nous avons aussi travaillé un peu sur les personnages.

Chaque atelier allait à un pas mesuré avec soin. Nous commencions avec un point sur le groupe où chacun avait la place de s’exprimer sur comment ils se sentaient ; pour cela, nous utilisions le mouvement, les arts plastiques, la musique, des tissus. Ensuite, nous jouions avec un échauffement musical/physique. Puis nous faisions quelques exercices de chœur pour mettre au point les compétences que le groupe allait utiliser pour leur représentation. Après cela, il y avait une période de mise au point avant de se rassembler de nouveau pour faire un retour sur cette session, parfois verbalement, parfois en réalisant des œuvres de groupe. Enfin, nous faisions un dernier point pour voir comment tout le monde se sentait avant de clore la session avec un ou deux jeux en cercle.

Le groupe a pu apprendre des choses sur le processus créatif derrière le spectacle de Ramshacklicious, « Grime », en s’essayant à quelques exercices que la compagnie avait elle-même utilisée durant la phase de recherche du projet, en observant la compagnie en répétition, en observant l’équipe technique au travail et en ayant des discussion de groupe sur les thèmes abordés par le spectacle.

Le thème de la maladie mentale est venu naturellement, dès les premières impressions que le groupe a eu en regardant les dessins de Tomasin Cuthbert, réalisés pendant la phase de recherche du projet Grime. J’ai demandé au groupe ce qu’ils pensaient des personnages, le groupe a répondu qu’ils avaient l’air triste, isolés et effrayés. J’étais d’accord. Certains ont ajouté spontanément qu’eux aussi se sentaient tristes, isolés et effrayés. J’ai demandé au groupe ce qu’ils pensaient de l’idée de faire un petit spectacle pour montrer à la compagnie ce que c’est de vivre avec une maladie mentale, et ils ont relevé le défi avec enthousiasme.

Pour créer ce petit spectacle, chacun des sept patients a créé un solo où ils parlaient de leur maladie. J’avais placé une chaise dans l’espace de notre salle de travail ; elle représentait leur maladie. Ils pouvaient la décrire, s’assoir sur la chaise et être la maladie ou se tenir derrière la chaise et prendre la voix de la maladie. Ces solos nous ont fourni la matière nécessaire à chacun des membres du groupe pour devenir metteur en scène et diriger les autres sur une scène en chœur. En tant que metteur en scène, chaque membre avait le pouvoir d’obtenir exactement ce qu’il voulait.

Lors de la représentation, on amena la compagnie dans notre salle et nous les avons fait assoir en cercle, les chaises orientées de façon à ce que les spectateurs tournaient le dos à l’intérieur du cercle. Les interprètes entraient et sortaient du cercle de chaises en serpentant au fil de leurs sept courtes scènes. Le « Cauchemar » était une scène sonore et effrayante avec des percussions et des respirations haletantes. Dans « Dépression », les interprètes se tenaient debout à l’intérieur du cercle et se battaient la poitrine avec leurs mains. Dans « Le Cri étouffé », les interprètes tentaient d’empêcher physiquement un cri de s’échapper de leur bouche. Dans « Timidité », le groupe essayait de ne pas se faire voir en se cachant derrière des morceaux de tissu. Dans « Anxiété », le groupe nouait le tissu en une boule et courrait ça et là avec une respiration courte et rapide. Dans « Les Voix », ils plaçaient leurs mains sur les oreilles des spectateurs pendant qu’un des interprètes jouait seul d’un petit tambour le long du périmètre de la scène. « Tristesse » était un poème, écrit et lu par une des interprètes tandis que les autres marchaient doucement autour du cercle, leurs mains sur le cœur.

La compagnie fut sincèrement émue et inspirée par cette performance et remercia le groupe d’avoir partagé cela avec eux. Le groupe quant à lui se senti si incroyablement puissant d’avoir créé ces scènes et d’avoir pu montrer leur créativité à une audience qu’ils ont demandé à jouer leurs scènes devant le public venu assister à la Visite de Chantier de « Grime ».

Lors de notre dernière répétition, le groupe a trouvé un nouveau final à leur pièce. Nous nous sommes tenus au centre du cercle, en nous tenant les mains, et chacun de nous a dit une phrase commençant par « Ensemble… ». La pièce devint soudainement une célébration de notre groupe et du temps passé ensemble.


Photo d’Holly Stoppit

3/ Quel souvenir garderas-tu de cette expérience ? un moment en particulier t’a-t-il davantage marqué ?

Tant de beaux souvenirs…

Lors du premier atelier, nous avons fait une improvisation de groupe où on imaginait être dans un parc. J’ai demandé « et ensuite, que se passe-t-il ? », quelqu’un a lancé « nous ramassons des fleurs » alors nous avons tous cueillis des fleurs sauvages. « Et ensuite, que se passe-t-il ? », « nous nous offrons les fleurs ! ». Et c’est ce que nous avons fait.

La session suivante a commencé par une mise au point sur le groupe. J’avais apporté de vraies fleurs pour le groupe. J’ai demandé à chacun « Quelle fleur êtes-vous aujourd’hui, et pourquoi ? ». Certains étaient les fleurs ouvertes tournées vers le soleil, d’autres les boutons serrés, repliés et endormis. A la fin de la session, j’ai ressorti les fleurs et cette fois tout le monde a choisi une fleur ouverte. Les dessins réalisés ensemble ce jour-là avaient tous au moins un bouquet de fleur.

J’ai beaucoup aimé voir le groupe trouver le courage de s’exprimer avec de la musique, du mouvement, des mots et de l’art. J’ai adoré entrer dans leur imagination avec eux. Voici quelques-unes de mes images favorites… Une girafe malade avec une échelle posée contre elle pour que le vétérinaire puisse l’atteindre, une piste de cirque, une baignoire et un champ de course fait de tissu rouge, des apparitions récurrentes de superman, la tristesse, la joie et la jalousie jouées avec des percussions, des bains de sons, le car-wash humain et le jardin secret de tout le monde.

Le groupe a eu l’air vraiment ravi le jour où nous avons fait la visite des coulisses. Ils ont rencontré Tomasin, la costumière, et ils ont pu découvrir les ignobles costumes sur lesquels elle travaillait. Ils ont rencontré Emma, la marionnettiste, et ont pu voir les marionnettes de viande qu’elle fabriquait. Ils ont rencontré Pete, l’ingénieur du son et ont écouté certains de ses sons de viande. Et ils ont rencontré Will, le scénographe, qui leur a permis de voir son propulseur-de-pain-à-hamburger en action.

Lors de la Visite de Chantier il y eut un tonnerre d’applaudissements. Après notre pièce, le public a applaudi, et applaudi et applaudi et j’ai regardé les autres et je leur ai demandé « qu’est-ce qu’on fait ? ». Un des patients a répondu « nous devrions marcher autour du cercle ». Et donc nous avons fait un tour d’honneur, en nous tenant les mains et en recevant les salves d’applaudissements.

Interview de Felicity "Flick" Ferdinando

1/ Pourrais-tu te présenter et nous parler de ton parcours ?
Je m’appelle Felicity (Flick) Ferdinando. Je suis une interprète et metteuse en scène. J’ai reçu une formation éclectique qui a couvert beaucoup de genres différents de performance. J’ai été formée en danse classique et contemporaine dès mon plus jeune âge. J’ai étudié le théâtre classique pendant sept ans au sein d’un théâtre pour les jeunes qui était associé à un théâtre de répertoire, c’est à cette occasion que je me suis passionnée pour la discipline du théâtre. Ensuite, je suis allée à une école de cirque à Bristol appelée « Fool Time » où j’ai étudié le Jeu, le théâtre d’expression et le théâtre de performance. J’ai étudié le trapèze, surtout le trapèze, puis l’acrobatie en partenariat dynamique. Ma motivation, au-delà de ma formation, c’était d’arriver à réunir toutes ces formes pour créer des spectacles – des spectacles qui utiliseraient le cirque pour raconter un récit, un récit raconté à travers du théâtre de performance et visuel par du texte créé à partir du travail physique.

J’ai créé une compagnie qui est partie en tournée à l’échelle nationale et internationale pendant 13 ans. La compagnie FZ. J’ai aussi été la conseillère artistique et la directrice théâtre pour la licence en arts du cirque au Centre national des arts du cirque (anciennement le Circus Space) de Londres, et ce pendant huit ans. Pendant cette période-là, j’ai beaucoup travaillé dans les arts de la rue en tant que praticienne et en tant que metteuse en scène freelance pour des collectifs jouant en intérieur et en extérieur. J’ai actuellement deux spectacles dans lesquels je joue, « Horse » et « The Caroline Carter show ».

2/ Quel a été ton rôle sur cette creation ?
Je suis arrivée sur le projet pour m’occuper de la distribution puis travailler avec les artistes et l’équipe technique qui vont créer le spectacle que je devrais ensuite mettre en scène. Au départ il y a eu une phase de recherche et développement où le directeur artistique de la compagnie a pu prendre des décisions claires dès le départ pour l’élaboration du spectacle.

J’étais ensuite chargée de développer les personnages avec les acteurs, guider le processus de création du récit, faire le lien avec l’équipe technique sur leurs besoins et sur la façon dont leur travail pouvait se nourrir de ce processus. Enfin j’étais chargée de mettre en scène la pièce une fois que toute la matière fut créée et que nous sentions que l’histoire avait une bonne cohérence et une bonne fluidité.

3/ Peux-tu nous expliquer ce sur quoi vous avez travaillé durant votre résidence à l’Atelier 231 ?
A l’Atelier 231, j’ai passé la première semaine à étudier le récit en ayant bien les personnages en tête et en décortiquant les relations entre eux : comment ils interagissent les uns avec les autres, leur niveau de jeu, recherchant les moments dans la pièce où le jeu pouvait devenir plus ou moins grotesque. Pour cela, nous avons joué à des jeux et avons évolué à travers des exercices qui ont aussi permis aux acteurs de trouver un langage commun sur lequel ils pouvaient travailler. Ensuite, nous avons commencé à créer des choses dont nous étions certains qu’elles auraient leur place dans le spectacle. Nous avons continué à étudier le récit de l’ensemble de la pièce et avons tenté de restituer cela sous forme de premiers jets de scènes, pour voir si le tout était cohérent. Nous avons par trois fois fait un retour au récit en le remettant en question pour trouver la logique de la pièce. En plus de cela, nous avons continué à développer des scènes particulières que l’on voulait garder pour montrer au public lors de la Visite de Chantier des passages forts extraits du spectacle. Il était important à nos yeux de voir comment le public réagirait à ce type de forme, voir si l’humour fonctionnait et arrivait à percer malgré un sujet intrinsèquement très sombre. Quand nous sommes retourné au Royaume-Uni, nous avons pu nous baser sur cette étape de travail et aller plus loin en sachant ce qu’il fallait pousser et ce qu’il fallait atténuer. Nous pouvions donc finir ce spectacle en sachant que nous avions un récit solide qui avait été minutieusement étudié.

Texte : Louise Jacquet et Sylvain Marchand
Traduction : Julia Duchemin
Photos : Louise Jacquet, Caroline Lelong et Sylvain Marchand

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